Histoire de la Socca
La socca a des origines lointaines. A Nice, ce plat est devenu identitaire. Découvrez son histoire…
La Socca est une sorte de très fine « galette » à base de farine de pois chiche cuite au feu de bois, très appréciée des Niçois et des touristes curieux qui ont la chance de la connaître.
Le pois chiche se répand sur le pourtour méditerranéen dès le deuxième millénaire avant JC avec les marins phéniciens. A la fondation de Nikaïa (à l’origine de Nice au IV siècle avant JC) par les Phocéens, la tradition de plats à base de farine de pois chiche frite dans l’huile est attestée dans toute la région.
Ainsi depuis quatre millénaires, on rencontre des préparations à base de friture de pois chiche tout autour de la Méditerranée. Les préparations sont multiples, chaque culture en a fait son plat spécifique.
Depuis le XVIIème siècle, les niçois ont su affiner de façon originale cette préparation. Ils se mirent à verser la pâte en couche fine dans un plat cuivré qui tient bien la chaleur sur un fond d’huile chauffée et à l’enfourner dans un four à bois très chaud. Ainsi est né le plat que nous connaissons, désormais ancré dans le patrimoine culinaire de la ville sous l'appellation «socca» (pour la prononciation, avalez le « a » final).
Dans les années 1900, le plat est rendu populaire, en particulier par l'intermédiaire d'une marchande ambulante, une certaine Theresa, qui « à l'heure des oiseaux et des pêcheurs » se rendait vendre sa production avec un fourneau ambulant sur le quai du Midi, l’actuel quai des Etats-Unis.
Ainsi, dans la vieille ville ou dans les quartiers laborieux du port ou de Riquier, les ouvriers faisaient leur merenda, casse-croûte en niçois, avec de la socca. Il n'était pas rare dans la vieille ville d'entendre l'appel des vendeurs de rue de jadis : "Cauda, cauda, cauda la socca !" Pêcheurs, dockers, ouvriers de l'usine de tabac usaient alors de leur portion de socca comme garniture en la glissant dans une petite miche de pain. Cette façon de la déguster, « à l'ancienne », a quasiment disparu aujourd'hui.
La socca se déguste chaude, si possible juste à la sortie du four, souvent accompagnée de poivre et directement avec les doigts. Une fois refroidie, elle perd ses qualités gustatives. C'est pourquoi, lorsqu'elle est achetée, elle est généralement consommée « sur place », ou à emporter, aussi vite que possible.
La Socca a manqué de disparaître à Nice dans les années 60, elle paraissait un plat « trop pauvre », « trop rustre » ou « peu diététique ». Seuls quelques rares lieux, Chez Pipo rue Bavastro et la mère Thérésa au Marché du Cours Saleya, ou à la cave Ricord près de la place Garibaldi, aujourd’hui disparue, avaient conservé la tradition.
Heureusement, l’influence de quelques niçois de souche, amoureux de Nice et de sa cuisine, par leurs livres et leurs conférences, a su (re)créer un nouvel attrait pour ce plat. Aujourd’hui le relai est bien pris et il est possible de la déguster dans de multiples restaurants ou simples bistrots niçois. Désormais, le plat est plus que jamais dans l’air du temps avec des qualités nutritionnelles établies, un index glycémique faible, de riches protéines végétales et, par nature, sans gluten… De quoi ravir une clientèle de tout âge et cosmopolite.
Texte écrit avec le concours d’André Giordan, professeur à l’université de Genève, spécialiste de l’histoire de la cuisine »